Février 2007. Deux êtres humains se promènent « 6000 pieds au-dessus du niveau de la mer, et bien plus encore au-dessus de toutes les choses humaines ». Un philosophe et un vigneron, dans un état, une dimension qui n’est plus vraiment la leur.
Ça parle en eux
Ils marchent dans la neige, en direction d’une vallée reculée. Ils s’y enfoncent, en suivant des traces inconnues. Leur esprit toujours plus léger, plus libre, les traces toujours plus improbables. Et ils parlent. N’arrêtent pas de parler. Mieux : ça parle, ça parle en eux. Ça n’arrête pas de parler en eux. En eux et autour d’eux, finalement à partir d’eux.
Des mots se libèrent, comme par enchantement. Comme s’ils provenaient du paysage dans lequel ils s’enfoncent et s’enivrent. De la neige, des montagnes, des rochers de toute taille et de toute forme. Du ciel, d’un bleu inouï, du soleil, brillant comme jamais, des ombres, terriblement sombres, de la neige, d’une blancheur immaculée. De la neige, partout de la neige. Et là-haut, dans le ciel, si bleu, si haut, près du soleil, un aigle avec un serpent enroulé autour du cou.
Mouvement phusique
Les mots raconte comment l’homme a pris l’habitude de considérer le monde. Comment il en est venu à oublier ce qu’il est, à ne plus expérimenter les forces qui le traversent. Ces mots, ils commencent par les choisir, à les déployer, à partir du grec ancien. Avant de perdre le contrôle, de les suivre, de les accompagner, jusqu’à découvrir des idées impensables, d’une incroyable vérité, beauté et cohérence, loin en-deçà et au-delà d’eux-mêmes. Jusqu’à formuler le mouvement phusique, mouvement de pensée, aussi inédit que vieux, comme le monde, au plus loin de notre volonté de clarté qui triomphe depuis la nuit des temps. Mouvement qui a trait à la phusis (mot grec pour nature), expérimentée comme éclosion des profondeurs, pulsivité productrice à partir du retrait et de la destruction, enfantin jeu divin d’un artiste de la vie et de la mort : Dionysos.
Biologie, biodynamie, phusis
Le mouvement apparaît pas à pas, étape par étape. Au fil de de la pérégrination. Il part du concept de « biologie » : approche logique et rationnelle du vivant comme objet physico-chimique. Il en vient à la « biodynamie » : travail sur les possibilités du vivant comme ensemble. Pour aboutir au mouvement phusique : accompagnement productif et mise en œuvre des forces de vie en leur va-et-vient interdépendant.
Au retour de leur promenade, le philosophe a fixé, nettoyé et complété le cheminement, qui n’est autre que le noyau théorique de ce qui les rassemble et travaille et depuis. Il se trouve ici.